Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/115

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cette voix dont le charme irrésistible réveille la tendresse du dieu son époux : « Tandis que les rois de la Grèce désolaient Ilion, leur proie, et saccageaient ses tours dévouées aux feux ennemis, je n’implorai pour une ville malheureuse ni les merveilles de votre art, ni ces traits redoutables que forgent vos mains immortelles. J’aurais craint, cher époux, d’imposer à vos veilles un labeur inutile. Et pourtant, que ne devais-je pas aux enfans de Priam ! que de pleurs me coûtait souvent le sort cruel d’Énée ! Maintenant, conduit par Jupiter, il a touché les champs Rutules. Je viens donc, enfin suppliante, je viens, ô dieu que je révère, vous demander des armes : c’est une mère, hélas ! qui les demande pour un fils. Près de vous la fille de Nérée, près de vous l’épouse de Tithon, n’essayèrent pas en vain leurs larmes. Voyez quelles ligues nous menacent ; quelles cités, quels peuples, à l’ombre de leurs murailles, aiguisent leurs dards contre moi, et conspirent la perte des miens. »

Elle dit ; et, pendant qu’il balance, Vénus, ouvrant ses bras d’albâtre, y presse mollement son époux. Aussitôt Vulcain sent renaître sa flamme accoutumée : une ardeur connue se rallume en ses veines, et dans ses sens émus court le feu du désir. Tel, quand la foudre étincelante fend les airs embrasés, l’éclair brille, et fuit à travers les nuages en sillon de lumière. L’aimable Cythérée s’applaudit du succès de sa ruse et du triomphe de ses charmes. Alors le dieu qu’enchaîne un éternel amour : « Pourquoi ces longs détours, déesse ? Vénus ne se fie-t-elle