Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/125

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victimes expirer d’un long trépas. Las enfin de tant de fureurs, le peuple indigné court aux armes ; on assiége l’impie dans ses forts, on égorge ses gardes, on fait voler la flamme jusqu’au faîte de ses tours. Le cruel, échappé au carnage, s’est réfugié sur les terres des Rutules ; et Turnus, qui l’accueille, jure encore de le venger. L’Étrurie donc, en son juste courroux, s’est levée toute entière ; et ses légions, le glaive en main, demandent le sang de l’oppresseur.

Voilà, prince, les milliers de soldats que je veux joindre à vos drapeaux. Déjà frémissent d’impatience les poupes rassemblées au rivage ; déjà les braves ont dit, Partons ! Un sage aruspice les arrête, et sa voix inspirée leur crie : Noble élite des Méoniens, fiers émules des anciens héros, vous que précipite aux combats un juste ressentiment, vous que Mézence enflamme d’une colère méritée ! le ciel défend qu’un Ausonien commande un peuple si puissant : choisissez des chefs étrangers. Captive ainsi près du bord, leur valeur n’ose le franchir contre l’avis des dieux. Tarchon lui-même, par ses ambassadeurs, m’a fait offrir le sceptre et la couronne ; il a mis à mes pieds les ornemens des rois ; il m’appelle en ses camps, et m’invite à m’asseoir sur le trône de Tyrrhène. Mais refroidie par les glaces de l’âge, accablée du poids des hivers, ma vieillesse renonce à l’empire, et mon bras engourdi refuse de servir mon courage. Ce brillant diadème, mon fils l’eût accepté peut-être, si le sang des Sabins que lui transmit sa mère ne