Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/197

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Neptune, arrache les palis dont le camp se hérisse, et, plantant ses échelles, donne le signal de l’assaut.

Vous, ô Muses des héros ! je vous invoque ; inspirez votre poète ; dites par quel sanglant carnage, par quelles horribles funérailles, Turnus en ce moment signala son glaive homicide ; dites quels guerriers ces plaines virent alors descendre au Tartare ; et déployez sous mes yeux l’immense tableau de ces combats célèbres : ils sont présens, déesses, à votre souvenir, et vous pouvez en retracer l’histoire.

Une tour immense, exhaussée jusqu’aux nues, et garnie de ponts élevés, commandait les lieux d’alentour. Réunies contre elle, toutes les forces des Latins la pressaient à la fois ; tous, conspirant d’audace, brûlaient de la renverser. Non moins ardens eux-mêmes, les Troyens, pour la défendre, faisaient voler les pierres, et, par ses larges embrasures, obscurcissaient les airs d’un orage de traits. L’impatient Turnus y lance une flèche embrasée : la flamme s’attache aux parois qu’elle atteint : sa fureur, accrue par les vents, se déploie d’étage en étage, et dévore les toits qui pétillent allumés de toutes parts. L’effroi pénètre avec la flamme jusqu’aux abris cachés. Vainement les Troyens veulent fuir le fléau qui les poursuit. Pendant qu’ils se pressent, reculent, et se portent en foule vers l’étroit côté que les feux épargnent encore, la tour, succombant sous le poids, s’écroule tout à coup ; et le ciel au loin retentit d’un horrible fracas. Ils tombent expirant au pied des murailles, ensevelis sous les vastes décombres, ou percés de leurs