Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/377

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’Apennin. Nul des Liguriens ne l’effaça dans l’art des stratagèmes, tant que les destins lui permirent de prolonger ses jours. Voyant qu’il tenterait en vain la fuite peur éviter le combat et se dérober aux poursuites de l’ardente Amazone, il appelle à son aide l’artifice et l’adresse. « Quelle merveille, s’écrie-t-il, qu’une femme ait tant d’audace, quand elle compte sur la vitesse d’un coursier ? laisse-là cette ressource des lâches : ose descendre à terre, et combattons à pied ; tu verras bientôt qui de nous deux égare un fol orgueil. » Il dit ; la bouillante Amazone s’est enflammée d’un généreux courroux. Elle confie son coursier à l’une de ses compagnes, et se présente au combat sous des armes égales : seule, à pied, le glaive en main, et couverte de son léger pavois, Camille attend sans pâlir son astucieux adversaire. Lui, triomphant déjà du succès de son stratagème, il tourne aussitôt la bride, et, plus prompt que l’éclair, il fuit, et fatigue de l’éperon son rapide coursier. « Perfide Ligurien, voilà donc cette bravoure dont tu faisais parade ! Mais en vain ta fourbe a recours aux ruses de ton pays : ton lâche artifice ne te rendra point vivant à ton père, le fallacieux Aunus. » Ainsi la guerrière s’indigne : la colère donne à ses pieds des ailes ; son vol devance le coursier fugitif ; elle saisit les rênes, et s’offrant face à face à son timide adversaire, le fait rouler sans vie dans les flots de son sang. Tel, du sommet d’un roc, l’oiseau de Mars fond, les ailes déployées, sur la colombe qui plane au sein des nues, la saisit, et la