Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/381

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pressant d’un bras nerveux, le soutient dans les airs et l’emporte en courant. Un cri subit s’élève jusqu’au ciel ; et, de toutes parts, les Latins ont tourné la vue : Tarchon, le feu dans les yeux, vole à travers la plaine, emportant et l’homme et l’armure : il rompt le fer de la lance que son ennemi lève encore, et cherche le défaut de la cuirasse, pour y porter le coup mortel : l’Ausonien se débat, écarte la pointe meurtrière suspendue sur sa gorge, et repousse la force par la force. Telle, en son vol, une aigle vigoureuse promène dans la nue le serpent qu’elle a saisi, l’enlace dans ses robustes serres, et le déchire de ses ongles tranchans : le reptile blessé se plie et se replie en tortueux anneaux ; il hérisse ses écailles sanglantes, pousse d’horribles sifflemens, et dresse une gueule écumante : vains efforts ! l’oiseau de Jupiter redouble les morsures de son bec recourbé, bat les airs de ses ailes, et se perd dans les cieux. Tel, aux yeux mêmes des soldats de Tibur, Tarchon, chargé de sa proie, vole, et la porte en triomphe. Entraînés par l’exemple et l’exploit de leur chef, les descendans de Méonie retournent au combat avec une nouvelle ardeur.

En ce moment Arruns, que cette journée doit aux dieux infernaux, voltigeait, armé d’un dard, autour de la légère Camille ; et, plus rusé qu’elle, épiait pour l’immoler un propice hasard. Voit-on l’ardente Amazone précipiter son courage au milieu des bataillons ; Arruns y pénètre en secret, et s’attache sans bruit à ses pas. Revient-elle victorieuse, et fumante du sang ennemi ; Arruns la suit encore, et pousse