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L’ÉNÉIDE, LIV. XII.

sang ou le sien termine enfin la guerre ; que le glaive et la mort nomment l’époux de Lavinie. »

Il dit ; et plus prompt que l’éclair, il vole à son palais, demande ses coursiers, et frémit de plaisir en voyant leur ardeur : ces coursiers généreux, Pilumnus les reçut jadis en présent de la belle Orithye ; moins blanche est la neige, moins légers sont les vents ; autour d’eux s’empressent leurs conducteurs fidèles, dont la main caressante se promène sur leur poitrail, et peigne leurs crins flottans. Lui-même il revêt ses épaules d’une brillante cuirasse, où se marient l’or pur et le bronze argenté : en même temps, il ajuste et son large pavois, et son cimier qu’ombragent deux panaches de pourpre, et sa foudroyante épée, cette épée héréditaire, que forgea pour Daunus le dieu du feu lui-même, et qu’il trempa bouillante dans les eaux du Styx. Le long d’une colonne immense pendait sous ses lambris une énorme javeline, dépouille du fier Actor le plus vaillant des Auronques : il la saisit d’une main robuste, la balance avec force, et s’écrie d’une voix terrible : « Allons, ô toi qui ne trompe jamais l’appel de ma valeur, allons, ô ma lance ! voici l’heure des nobles exploits. Jadis portée par le grand Actor, c’est le bras de Turnus qui te porte aujourd’hui. Fais que j’abatte mon odieux rival ; que j’arrache à ce vil Phrygien sa cuirasse impuissante, déchirée sous mes coups ; que je traîne dans la fange ses cheveux efféminés, dont un fer brûlant arrondit les boucles légères, et dont la myrrhe odorante a parfumé les nœuds. »