Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/431

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l’Épouvante au front pâle, et l’ardente Colère, et l’insidieux Stratagème, hideux cortège, précipitent leurs pas. Ainsi l’impétueux Turnus pousse à travers la mêlée son char fumant de carnage ; ainsi le cruel insulte à ses victimes expirantes : sous les bonds de ses coursiers agiles, le sang jaillit en affreuse rosée ; et l’arène qu’ils foulent s’en abreuve à longs flots.

Déjà sont tombés sous ses coups et Sthénélus et Thamyris et Pholus : Pholus et Thamyris ont péri par son glaive, Sthénélus par ses traits. Ses traits atteignent encore et Glaucus et Ladès, tous deux fils d’Imbrasus, et qu’Imbrasus avait nourris lui-même dans les champs lyciens ; que lui-même il avait parés d’une armure semblable ; qu’il avait instruits lui-même, soit à combattre de pied ferme, soit à devancer les zéphyrs sur un coursier sans frein. Plus loin, courait de rangs en rangs Eumède, rejeton belliqueux de l’antique Dolon. Héritier du nom de son aïeul, Eumède a le cœur et le bras de son père. Jadis parti dans l’ombre pour observer le camp des Grecs, Dolon osa demander en récompense le char du fils de Pélée : mais Diomède paya tant d’audace d’un prix bien différent ; et Dolon ne prétend plus au char d’Achille. Tandis que l’imprudent Eumède s’abandonne dans la plaine, Turnus, qui l’aperçoit de loin, lui lance d’abord un javelot léger qui le frappe en fuyant ; il arrête ensuite ses coursiers, s’élance de son char, et fond sur le Troyen déjà couché par terre, déjà baigné dans son sang : puis le foulant d’un pied superbe, il lui arrache des mains l’épée qu’il tient encore, et lui plonge dans la gorge