Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/449

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mêlée ; c’est maintenant qu’un noir courroux bouillonne dans leurs veines, que leur âme indomptable ne se possède plus, que tous leurs coups portent des blessures mortelles. Sous le fils d’Anchise succombe le fier Murranus ; Murranus, qu’enorgueillissaient ses aïeux, et la gloire de sa race antique, et cette longue suite de rois latins dont il était descendu : un bloc énorme, lancé d’une main puissante, le renverse de son char, et l’étend sur la poussière : la roue, en tournoyant, l’entraîne sous le timon sans guide ; et ses ingrats coursiers, méconnaissant leur maître, foulent indignement son cadavre. Sur le fils de Daunus s’élançait, frémissant de rage, l’audacieux Hyllus : le bouillant monarque fond lui-même sur le téméraire, et d’un lourd javelot atteint son casque d’or : le trait vainqueur perce la brillante armure, et demeure enfoncé dans le cerveau sanglant. Ton bras, généreux Crétée, ton bras, dont la Grèce exaltait la vaillance, ne te garantit point des fureurs de Turnus. Et toi, infortuné Cupence, tes dieux te laissent sans secours aux approches d’Énée : le fer de sa javeline te déchire le cœur, et l’airain de ton bouclier ne peut retarder ton trépas. Toi aussi, redoutable Éole, les campagnes du Latium virent ta chute déplorable, et ton corps gigantesque étendu dans la fange : tu tombes, toi que n’avaient pu terrasser ni les hordes des Grecs, ni la lance d’Achille, d’Achille qui renversa l’empire de Priam. Là t’attendait la mort. Tu possédais un palais superbe au pied du mont Ida, dans Lyrnesse un palais superbe : c’est aux champs de Laurente qu’est creusé ton cercueil.