Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/465

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que doive être le sort du combat, il ne pèsera que sur moi : seul, ainsi le veut la justice, seul je dois acquitter pour tous les engagemens du traité ; c’est à mon glaive à vider ma querelle. » Aussitôt les rangs s’écartent ; un large espace sépare les deux armées.

Au seul nom de Turnus, le fils d’Anchise abandonne les murailles, abandonne les tours élevées : dans son impatience, il s’arrache à tous les obstacles, interrompt tous les travaux, et, tressaillant de joie, fait retentir son armure comme un affreux tonnerre. Moins superbe est l’Athos ; moins grand paraît l’Éryx ; moins majestueux se présente l’antique Apennin lui-même, lorsqu’il agite en frémissant ses bruyantes forêts, et s’applaudit de porter dans les nues son front couronné de frimas. Déjà Rutules, Troyens, et Latins, tous à l’envi ont tourné les yeux vers la lice : et ceux qui, la lance en arrêt, bordent le faîte des remparts, et ceux dont le bélier terrible sapait le pied des murailles, tous, attentifs au combat qui s’apprête, laissent reposer leurs armes inutiles. Latinus, étonné lui-même, admire par quel sort deux guerriers redoutables, nés aux deux bouts de l’univers, accourent se mesurer sous les murs de Laurente, et disputer, le fer en main, le prix de la valeur. À peine ces fiers rivaux ont-ils vu le champ libre et la carrière ouverte ; ils partent, aussi prompts que l’éclair, et font voler de loin leur énorme javeline. Bientôt s’attaquant de plus près, ils se heurtent à grand bruit de leurs lourds boucliers : l’airain crie, froissé par l’airain ; et la terre tremble, ébranlée sous leur choc. Enfin croisant le glaive, ils se portent