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Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres VII-XII.djvu/61

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Au Latium régnait un usage antique et sacré. Longtemps Albe le révéra jadis ; et la maîtresse du monde, Rome, le révère encore de nos jours. Rome proclame encore avec pompe le signal des batailles, soit qu’elle songe à porter la mort aux indomptables Gètes, à l’Hyrcanien sauvage, aux vagabonds Arabes ; soit qu’elle prétende marcher contre l’Indien brûlant, poursuivre aux bornes de l’univers les peuplades de l’Aurore, ou reconquérir sur le Parthe nos aigles prisonnières. Il est deux portes fatales, qu’on nomme les Portes de la Guerre, objet d’un religieux effroi, et consacrées par la Peur à l’impitoyable Mars. Cent verrous d’airain, cent câbles de fer à l’épreuve du temps les ferment durant la paix ; et Janus, qui les garde, n’en quitte point le seuil redouté. Mais quand le sénat se prépare à déchaîner les foudres du Capitole, le Consul, décoré de la robe Quirinale, et ceint de l’écharpe Gabienne, les fait tourner lui-même sur leurs pivots grondans : lui-même appelle les combats. La jeunesse lui répond par des cris belliqueux, et le clairon les seconde par ses bruyans accords. Ainsi Laurente, invoquant la guerre contre les compagnons d’Énée, pressait Latinus d’obéir à cette loi solennelle et d’ouvrir les portes sinistres. Le pacifique vieillard se refuse à les toucher ; il repousse avec horreur ce triste ministère, et reste inaccessible dans l’ombre de son palais. Alors la reine des dieux, s’élançant de l’Olympe, pousse de sa main puissante l’inflexible barrière, et, sur leurs gonds qui mugissent, enfonce les battans rebelles dont elle a rompu les barreaux.

À l’instant l’Ausonie s’embrase, l’Ausonie, calme