Page:Virgile - Georgiques Delille 1819.djvu/147

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Les trésors de Bacchus valent-ils ces richesses ?
Mortels, défiez-vous de ses faveurs traîtresses :
C’est par lui que l’on vit les Centaures vaincus,
Et Pholus immolé par la main de Rhétus ;
Et, le plus menaçant de cette horrible troupe,
Hylée à l’ennemi lançant sa large coupe.
Ah ! Loin des fiers combats, loin d’un luxe imposteur,
Heureux l’homme des champs, s’il connaît son bonheur !
Fidèle à ses besoins, à ses travaux docile,
La terre lui fournit un aliment facile.
Sans doute, il ne voit pas, au retour du soleil,
De leur patron superbe adorant le réveil,
Sous les lambris pompeux de ses toits magnifiques,
Des flots d’adulateurs inonder ses portiques ;
Il ne voit pas le peuple y dévorer des yeux
De riches tapis d’or, des vases précieux ;
D’agréables poisons ne brûlent point ses veines ;
Tyr n’altéra jamais la blancheur de ses laines ;
Il n’a point tous ces arts qui trompent notre ennui ;
Mais que lui manque-t-il ? La nature est à lui :
Des grottes, des étangs, une claire fontaine
Dont l’onde, en murmurant, l’endort sous un vieux chêne ;
Un troupeau qui mugit, des vallons, des forêts :
Ce sont là ses trésors, ce sont là ses palais.
C’est dans les champs qu’on trouve une mâle jeunesse ;
C’est là qu’on sert les dieux, qu’on chérit la vieillesse :
La justice, fuyant nos coupables climats,
Sous le chaume innocent porta ses derniers pas.
Ô vous, à qui j’offris mes premiers sacrifices,
Muses, soyez toujours mes plus chères délices !
Dites-moi quelle cause éclipse dans leur cours
Le clair flambeau des nuits, l’astre pompeux des jours ;
Pourquoi la terre tremble, et pourquoi la mer gronde ;
Quel pouvoir fait enfler, fait décroître son onde ;
Comment de nos soleils l’inégale clarté
S’abrège dans l’hiver, se prolonge en été ;