Page:Virgile - Georgiques Delille 1819.djvu/191

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Tout s’éloigne, tout fuit : les jeunes combattants,
Tressaillant d’espérance, et d’effroi palpitants,
À leurs bouillants transports abandonnent leur âme ;
Ils pressent leurs coursiers ; l’essieu siffle et s’enflamme ;
On les voit se baisser, se dresser tour à tour ;
Des tourbillons de sable ont obscurci le jour :
On se quitte, on s’atteint, on s’approche, on s’évite ;
Des chevaux haletants le crin poudreux s’agite ;
Et, blanchissant d’écume et baigné de sueur,
Le vaincu de son souffle humecte le vainqueur :
Tant la gloire leur plaît, tant l’honneur les anime !
Erichthon le premier, par un effort sublime,
Osa plier au joug quatre coursiers fougueux,
Et, porté sur un char, s’élancer avec eux.
Le Lapithe, monté sur ces monstres farouches,
À recevoir le frein accoutuma leurs bouches,
Leur apprit à bondir, à cadencer leurs pas,
Et gouverna leur fougue au milieu des combats.
Mais, soit qu’il traîne un char, soit qu’il porte son guide,
J’exige qu’un coursier soit jeune, ardent, rapide :
Fût-il sorti d’Épire, eût-il servi les dieux,
Fût-il né du trident, il languit s’il est vieux.
Enfin ton choix est fait, aucun soin ne t’arrête :
Que le chef du troupeau pour son hymen s’apprête.
D’une prodigue main verse lui sa boisson ;
Qu’il s’engraisse du lait de la jeune moisson :
Autrement il succombe, aux plaisirs inhabile,
Et d’un père affaibli naît un enfant débile.
Au contraire, sitôt que les tendres désirs
Sollicitent la mère aux amoureux plaisirs,
Éloigne-la des eaux, retranche sa pâture ;
Et quand l’été brûlant fatigue la nature,
Lorsque l’aire gémit sous les fléaux pesants,
Qu’une pénible course amaigrisse ses flancs :