Page:Virgile - Georgiques Delille 1819.djvu/267

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Des symptômes certains toujours en avertissent :
Leur corps est décharné, leurs couleurs se flétrissent :
On les voit dans leurs murs languir emprisonnés,
Ou bien suspendre au seuil leurs essaims enchaînés ;
Tantôt leur troupe en deuil autour de ses murailles
Accompagne des morts les tristes funérailles ;
Tantôt le bruit plaintif de ce peuple aux abois
Imite l’aquilon murmurant dans les bois,
Et le reflux bruyant des ondes turbulentes,
Et le feu prisonnier dans les forges brûlantes.
Veux-tu rendre à l’abeille une utile vigueur ?
Que des sucs odorants raniment sa langueur ;
Et, dans des joncs, remplis du doux nectar qu’elle aime,
À prendre son repas invite-la toi-même.
Joins-y du raisin sec, du vin cuit dans l’airain,
Ou la pomme du chêne, ou les vapeurs du thym,
Et la rose flétrie, et l’herbe du centaure.
Mais il est une fleur plus salutaire encore.
Sur les bords tortueux qu’enrichit son limon,
Le Melle la voit naître, et lui donne son nom.
De rejetons nombreux un amas l’environne ;
D’un disque éclatant d’or sa tête se couronne ;
Mais de la violette, amante des gazons,
La pourpre rembrunie embellit ses rayons ;
Et souvent les autels, chargés de nos offrandes,
Aiment à se parer de ses riches guirlandes :
Le goût en est pourtant moins flatté que les yeux.
Dans les flots odorants d’un vin délicieux
Fais bouillir sa racine, et devant tes abeilles
De ce mets précieux fais remplir des corbeilles.
Mais si de tes essaims tout l’espoir est détruit,
Apprends par quels secrets ce peuple est reproduit :