Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 1.djvu/119

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Dans ces champs où d’Achille Hector devint la proie,
Où le grand Sarpédon périt aux yeux de Troie,
Où le Xanthe effrayé roule encor dans ses flots
Les casques et les dards, et les corps des héros ! »
  Il dit : l’orage affreux, qu’anime encor Borée,
Siffle et frappe la voile à grand bruit déchirée ;
Les rames en éclats échappent au rameur ;
Le vaisseau tourne au gré des vagues en fureur,
Et présente le flanc au flot qui le tourmente.
Soudain, amoncelée en montagne écumante,
L’onde bondit : les uns, sur la cime des flots,
Demeurent suspendus ; d’autres, au fond des eaux,
Roulent, épouvantés de découvrir la terre.
Aux sables bouillonnants l’onde livre la guerre.
Par le fougueux Autan, rapidement poussés
Contre de vastes rocs, trois vaisseaux sont lancés ;
Trois autres, par 1’Eurus, ô spectacle effroyable !
Sont jetés, enfoncés, enchaînés dans le sable.
Oronte, sur le sien, tel qu’un mont escarpé,
Voit fondre un large flot : par sa chute frappé,
Le pilote tremblant et la tête baissée,
Suit le flot qui retombe ; et l’onde courroucée,