Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 1.djvu/263

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Nous lui laissons le jour. Le roi lui-même ordonne
Qu’on détache ses fers : « Captif, on te pardonne,
Dit-il avec bonté, je brise tes liens ;
Oublie enfin les Grecs, et rends grâce aux Troyens ;
Nous t’adoptons. Et toi, réponds sans artifice :
Pourquoi de ce cheval l’étonnant édifice ?
Dis, quel en est le but ? quel en est l’inventeur ?
Est-ce un hommage aux dieux ? est-ce un piège imposteur ?
Qu’en devons-nous penser ? et que devons-nous craindre ? »
Le fourbe, chez les Grecs instruit dans l’art de feindre,
Levant au ciel ses bras remis en liberté :
« Chaste Vesta ! dit-il, sainte divinité !
Sacrés bandeaux ! autels parés pour mon supplice !
Fer que j’ai vu briller pour l’affreux sacrifice !
Je vous atteste ici qu’infidèle envers moi,
Mon pays pour toujours a dégagé ma foi ;
Que je puis rompre enfin le serment qui m’enchaîne,
Révéler ses secrets, et lui vouer ma haine.
Mais vous, si je vous sers, ô généreux Troyens !
Si je sauve vos jours, qu’on épargne les miens !...
  De Minerve longtemps la puissance céleste
Favorisa les Grecs ; mais, du moment funeste