Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 1.djvu/303

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Pyrrhus, le cœur brûlant d’une audace guerrière,
De ses armes d’airain fait jaillir la lumière :
Tel un affreux serpent, qui, nourri de poison,
Sous la terre dormait dans la froide saison,
Tout à coup reparaît, rayonnant de jeunesse,
S’étale avec orgueil, se roule, se redresse,
Darde un triple aiguillon, et de son corps vermeil
Allume les couleurs aux rayons du soleil.
  De héros sur ses pas une foule s’avance :
Ici, c’est Périphas, fier de sa taille immense ;
Là, c’est Automédon, qui d’Achille autrefois
Vit les coursiers fougueux obéir à sa voix ;
Et de Scyros enfin la jeunesse bouillante
Fait voler jusqu’aux toits la flamme étincelante.
A leur tête Pyrrhus, une hache à la main,
Frappe à coups redoublés sur les portes d’airain.
Les gonds tremblent ; des ais la vaste épaisseur s’ouvre :
Soudain jusques au fond l’œil étonné découvre
Ces longs appartements, ces lambris somptueux,
De nos antiques rois séjour majestueux.
On approche, on regarde, et debout sur la porte,
Paraît, le fer en main, une fière cohorte,
Qui d’un roi malheureux, d’un malheureux vieillard,
Dans son dernier asile est le dernier rempart :
Sa garde sur le seuil demeure inébranlable.
Mars au fond du palais quel tableau lamentable !
Partout l’effroi, le trouble et les gémissements :