Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 1.djvu/311

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Que les dieux, s’il en est qui vengent l’innocence,
T’accordent, malheureux ! ta juste récompense ;
Toi qui d’un sang chéri souilles mes cheveux blancs,
Qui sous les yeux d’un père égorges ses enfants !
Toi, fils d’Achille ! Non, il ne fut point ton père.
D’un ennemi vaincu respectant la misère,
Le meurtrier d’Hector, dans son noble courroux,
Ne vit pas sans pitié Priam à ses genoux,
Et pour rendre au tombeau des dépouilles si chères,
Il me renvoya libre au palais de mes pères.
Tiens, cruel ! » A ces mots, au vainqueur inhumain
Il jette un faible trait qui, du solide airain,
Effleurant la surface avec un vain murmure,
Languissamment expire, et pend à son armure.
« — Eh bien, cours aux enfers conter ce que tu vois,
A mes nobles aïeux va dire mes exploits ;
Dis au fils de Thétis que son sang dégénère ;
Mais avant meurs ! » Il dit ; et d’un bras sanguinaire,
Du monarque traîné par ses cheveux blanchis,
Et nageant dans le sang du dernier de ses fils,
Il pousse vers l’autel la vieillesse tremblante :
De l’autre, saisissant l’épée étincelante,