Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 2.djvu/147

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A son palais désert redemandant Enée,
Seule dans le silence, elle erre abandonnée ;
Au lieu qu’il occupait revient souvent s’asseoir,
Absent croit lui parler, absente croit le voir ;
Tantôt, prenant Ascagne, et fixant son visage,
Du père dans le fils elle embrasse l’image.
D’un amour qui se trompe inutiles efforts !
Cependant tout languit dans ses murs, dans ses ports ;
Ses guerriers amollis laissent dormir leurs lances.
L’amour a suspendu tous ces travaux immenses,
Ces temples, ces palais, ces forts audacieux,
Et ces superbes tours qui s’approchaient des cieux.
Dès que Junon la voit se livrer à sa flamme,
Et l’amour sur l’honneur l’emporter dans son âme,
Elle aborde Vénus, et lui parle en ces mots :
« Eh bien ! vous l’emportez, déesse de Paphos !
Pour vous, pour votre fils, quelle gloire éclatante.
Et quel noble succès a comblé votre attente !
Pour subjuguer Didon, contr’ elle sont unis
La ruse et le pouvoir, et la mère et le fils.
Applaudissez-vous bien de cette heureuse trame :
Deux puissances du ciel triomphent d’une femme !
Je connais