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Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 2.djvu/161

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Didon ne cache plus les secrets de son âme.
Son cœur en liberté laisse éclater sa flamme,
Et, pour couvrir l’erreur de ce malheureux jour,
Voile du nom d’hymen les larcins de l’amour.
Ainsi ces deux amants au sein de la mollesse
Goûtaient nonchalamment leur amoureuse ivresse.
Déjà la Renommée, en traversant les airs,
En a semé le bruit chez cent peuples divers.
Faible dans sa naissance, et timide à sa source,
Ce monstre s’enhardit, et s’accroît dans sa course.
La terre l’enfanta, pour se venger des cieux ;
Elle aime à publier les faiblesses des dieux.
Digne sœur des géants qu’écrasa leur tonnerre,
Son front est dans l’Olympe, et ses pieds sur la terre ;
Rien ne peut égaler son bruit tumultueux,
Rien ne peut devancer son vol impétueux :
Pour voir, pour écouter, pour semer les merveilles,
Ce monstre ouvre à la fois d’innombrables oreilles,
Par d’innombrables yeux surveille l’univers,
Et par autant de voix fait retentir les airs.
La nuit, d’un vol bruyant fendant l’espace sombre,
Il observe le crime enseveli dans l’ombre :
Le jour, il veille assis sur le palais des rois ;
Et, de là répandant son effrayante voix,
A l’univers surpris incessamment raconte
La vérité, l’erreur, et la gloire, et la honte.
Avec la même ardeur, la déesse, en son cours,
D’Enée et de