Page:Virgile L’Énéide Traduction de Jacques Delille - Tome 2.djvu/77

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Vous ne redoutez plus la fortune inconstante ;
Et nous, tristes jouets d’une si longue attente,
Le sort de mer en mer nous promène à son gré.
Vos malheurs sont finis, votre asile assuré ;
Vous n’allez point chercher sur de lointaines rives
Un empire inconnu, des terres fugitives :
Le doux aspect du Xanthe adoucit vos destins ;
Notre Ilion revit relevé par vos mains.
Puisse un destin plus doux respecter votre ouvrage !
Que la Grèce de Troie épargne au moins l’image !
Si le Tibre jamais me reçoit dans ses ports,
Si ces murs tant promis s’élèvent sur ses bords,
Unis par la naissance, unis par l’infortune,
Nos maux seront communs, notre gloire commune.
Oui, nos peuples, heureux d’un longue union,
Ne seront qu’un seul peuple, et qu’un seul Ilion :
Et des fils d’Ausonie et des enfants d’Epire,
Même sang, même amour réuniront l’empire.
Puisse un esprit semblable animer nos neveux ».
A ces mots je m’éloigne, en retournant les yeux
Vers ces murs fraternels, cette terre chérie,
Et vais sur l’onde encor poursuivre une patrie.