Page:Visan – Lettres à l’Élue, 1908.djvu/94

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centre de notre assemblée. Car nul ne peut se vanter d’avoir jamais soulevé la portière qui interceptait l’entrée du laboratoire de mon âme. J’en ai toujours défendu l’accès, même aux plus chers compagnons d’idées, ainsi qu’une femme défend ses baisers.

Il accusait pourtant quelque banalité, ce cabinet de travail rebondi et replet. Les livres encombraient ses murs d’une graisse parasite et obstruaient le visage des tentures.

Mais combien je m’enthousiasmais de cet embonpoint, lorsqu’enfoui dans un confortable fauteuil en cuir marron, devant une table chargée de manuscrits appétissants et bien servie de notes rares, je relevais la tête pour fixer une notion fugitive ! Mes yeux pouvaient aisément embrasser l’ensemble des civilisations, la totalité du savoir humain. Je me voyais le centre de toutes les métaphysiques, le Dieu des religions, le prêtre de ces diverses morales. Ma compréhension universelle égalait l’effort de chaque créateur. Ces chercheurs d’absolu, je les dominais en-