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Page:Visan - Paysages introspectifs, 1904.djvu/29

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totale, apercevrait l’unité fondamentale de la philosophie et de la poésie.

D’une part, la métaphysique va au delà du vrai jusqu’au réel ; elle étudie l’essence de l’être et de la vie[1]. La science au contraire, ayant pour objet la simple connaissance du relatif, c’est-à-dire des lois et des rapports entre les phénomènes, est plus vraie que réelle et se réduit en définitive à une création logique de l’esprit, — un rapport étant manifestement une abstraction. Le métaphysicien s’occupe des données immédiates de la conscience et des choses, de « la réalité, du contenu vivant et intuitif de l’expérience même, du sentiment de l’être et de l’action »[2].

D’autre part, si je déclare la poésie sœur de la métaphysique, c’est que je n’entends pas par poésie tout ce qu’on est convenu d’appeler des vers. Dans ce cas il suffirait qu’un discours soit écrit en vers pour se ranger dans la cohorte sainte des œuvres

  1. « Eh bien ! une métaphysique, c’est aussi un état d’âme. C’est une vie morale qui s’élabore, qui prend pleine conscience d’elle-même et se fixe dans des conceptions déterminées. Cela constitue vraiment une sorte de poème ; non pas un poème qui raconte des aventures imaginaires, mais un poème mis en action par celui qui le compose, exprimant son âme et son cœur, la réalité humaine qu’il est, avec ses efforts et ses espérances ou aussi avec ses lâchetés et ses désespoirs. » Laberthonnière, Essais de philosophie religieuse, p. 7.
  2. Fouillée, La métaphysique et la poésie de l’idéal, Revue des Deux-Mondes, 1er mars 1888.