Aller au contenu

Page:Visan - Paysages introspectifs, 1904.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on lient à rendre hommage à ses partisans, qui souvent ont sauté par-dessus les formules étroites pour s’élever jusqu’aux sommets les plus étincelants de l’art.

Puissent ces réflexions, hélas ! encore trop théoriques, quoique profondément senties, servir à d’autres meilleurs, et acheminer l’art vers ses fins les plus hautes et les plus naturelles. Ah ! qu’il fera bon s’incliner devant l’artiste qui condensera en une œuvre vigoureuse et fière tous ces membra disjecta ! Oui, devant celui-là, il fera bon s’incliner, — bien qu’en art les individualités seules existent, — qui saura réconcilier la foule avec le Beau[1], synthétiser les aspirations de notre époque si troublée, et tondre en un pur lingot d’or toutes ces pépites éparses. C’est devant celui-là qu’il fera bon s’incliner, qui doit venir, qui viendra, — qui est déjà venu d’ailleurs, — et qui n’est pas moi.

De fait, on me prendrait pour moins humble que je ne le veux être, si l’on me croyait capable d’illustrer ma propre théorie d’exemples probants,

  1. Ce temps est encore loin, mais la cause du retard apporté dans les rapports de sympathie entre l’artiste et le gros public tient aux conditions actuelles où le poète se trouve obligé de vivre. Si l’artiste s’est retranché dans sa solitude, ne produit plus que pour une élite, la faute en doit retomber, non sur l’art, mais sur la société contemporaine, cette « vaste entreprise alimentaire. »