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Page:Vivien - Une femme m’apparut, 1904.djvu/161

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UNE FEMME M’APPARUT…

attend sans doute, accordant un luth ou effeuillant une rose ? »

L’Androgyne me répondit brusquement, toute à l’intime trouble de son âme.

« Je crois qu’au fond de votre passion amère pour Vally il dort une tendresse insoupçonnée de vous-même. Je viens faire appel à cette douceur d’amitié qui est en vous. »

Mon étrange amie s’arrêta, indécise.

« Vous ne connaissez pas Vally comme moi. Votre âme britannique, où sommeille encore le vieux levain protestant, ne peut se plier à l’intelligence de ces flirtations très hardies et très ingénues où se complaît la rouerie puérilement perverse des Américaines. Vous êtes de races d’âmes différentes : vous ne vous comprendrez jamais. Vally aime à faire souffrir les hommes par l’offre impudente de son inviolable beauté. Elle a voulu cette attitude d’Idole tangible, et pourtant lointaine. Elle frémit délicatement de se savoir inaccessible dans une atmosphère brutale de désirs et de convoitises. Elle adore les tortures que font naître son regard