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Page:Vivien - Une femme m’apparut, 1904.djvu/208

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UNE FEMME M’APPARUT…

mon âme s’était si longtemps perdue… Ce serait pour elle le caprice d’une heure d’ennui, et, pour moi, la consolation inespérée. Ce serait mon cœur arraché de ma poitrine et ne me torturant plus de ses battements fébriles.

Mais une anxiété me retint. Oserais-je mettre ce fardeau de mon cœur trop lourd entre les mains d’une Enfant ?…

Les yeux rieurs de Dagmar étaient comme une eau de source baignée de soleil bleu.

« À quoi rêvez-vous ? » me demanda-t-elle. « Vos pensées m’inquiètent toujours. Vous avez un regard si sombre et une bouche si amère ! On dirait le regard et la bouche d’un vieil ermite, dont les paupières sont accoutumées aux ténèbres et dont les lèvres taciturnes ont le pli du silence.

— Je pensais à la Sœur Aloyse de Villiers de l’Isle-Adam. Jamais les yeux de l’âme n’ont contemplé un plus idéal visage de vierge amoureuse. Je pensais aussi que vous lui ressemblez, Dagmar, plus joyeuse et moins fervente, pourtant. »