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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/200

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au conflit des opinions fallacieuses ? L’homme étant nécessairement un être social, le but définitif de l’opération divine dans l’humanité est la création d’une société universelle parfaite. Mais ce n’est pas une création ex nihilo, La matière de la société parfaite est donnée, c’est la société imparfaite, l’humanité telle quelle. Elle n’est ni exclue ni supprimée par le Royaume de Dieu, elle est au contraire attirée dans la sphère de ce Royaume pour être régénérée, sanctifiée, transfigurée. Quand il s’agit de rattacher au Christ l’être individuel de l’homme, la religion ne se contente pas de la communion invisible et purement spirituelle, elle veut que l’homme communie avec son Dieu dans la totalité de son existence, même par l’acte physiologique de la nourriture. Dans cette communion mystique mais réelle la matière du sacrement n’est pas simplement détruite et anéantie, mais elle est transsubstantiée, c’est-à-dire que la substance intérieure et invisible du pain et du vin est exaltée dans la sphère de la corporéité divinisée du Christ et absorbée par elle, tandis que l’actualité phénoménale ou l’apparence extérieure de ces objets demeure sans aucun changement sensible pour pouvoir agir dans les conditions données de notre existence physique en la rattachant au corps de Dieu. De même quand il s’agit de la vie collective et publique de l’humanité, elle aussi doit être mystiquement transsubstantiée tout en gardant les