la méconnaît : sa peine naîtra de son aveuglement. Si elle est incertaine, équivoque, comment lui trouver le caractère qu’elle n’a pas ? Croire sans évidence, sans démonstration, est un acte d’ignorance et de sottise : le crédule se perd dans un dédale d’inconséquences ; l’homme sensé examine, discute, afin d’être d’accord dans ses opinions ; et l’homme de bonne foi supporte la contradiction, parce qu’elle seule fait naître l’évidence. La violence est l’argument du mensonge ; et imposer d’autorité une croyance, est l’acte et l’indice d’un tyran. »
Enhardi par ces paroles : « Ô Génie ! répondis-je, puisque ma raison est libre, je m’efforce en vain d’accueillir l’espoir flatteur dont tu la consoles : l’ame vertueuse et sensible se livre aisément aux rêves du bonheur, mais sans cesse une réalité cruelle la réveille à la souffrance et à la misère : plus je médite sur la nature de l’homme, plus j’examine l’état présent des sociétés, moins un monde de sagesse et de félicité me semble possible à réaliser. Je parcours de mes regards toute la face de notre hémisphère : en aucun lieu je n’aperçois le germe, ou ne pressens le mobile d’une heureuse révolution. L’Asie entière est ensevelie dans les plus profondes ténèbres. Le Chinois, avili par le despotisme du bambou, aveuglé par la superstition astrologique, entravé par un code immuable de gestes, par le vice radical