canton, chaque cité, par la différence de son langage, étant isolé de tout autre, il en résultait un chaos favorable à l’ignorance et à l’anarchie. Il n’y avait point de communication d’idées, point de participation d’invention, point d’harmonie d’intérêts ni de volontés ; point d’unité d’action, de conduite : en outre, tout moyen de répandre et de transmettre les idées se réduisant à la parole fugitive et limitée, à des écrits longs d’exécution, dispendieux et rares, il s’ensuivait empêchement de toute instruction pour le présent, perte d’expérience de génération à génération, instabilité, rétrogradation de lumières, et perpétuité de chaos et d’enfance. Au contraire, dans l’état moderne, et surtout dans celui de l’Europe, de grandes nations
ayant contracté l’alliance d’un même langage, il
s’est établi de vastes communautés d’opinions ; les
esprits se sont rapprochés, les cœurs se sont
étendus ; il y a eu accord de pensées, unité
d’action : ensuite, un art sacré, un don divin
du génie, l’imprimerie, ayant fourni le moyen
de répandre, de communiquer en un même instant une
même idée à des millions d’hommes, et de la fixer
d’une manière durable, sans que la puissance des
tyrans pût l’arrêter ni l’anéantir, il s’est formé
une masse progressive d’instruction, une atmosphère
croissant de lumières, qui, désormais, assurent
solidement l’amélioration. Et cette amélioration
devient un effet nécessaire des lois de la nature ;
car, par la loi de la sensibilité ; l’homme tend