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Page:Volney - Les Ruines, 1826.djvu/198

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analogues à la condition de leurs inventeurs furent long-tems confuses et grossières. Errans dans les bois, obsédés de besoins, dénués de ressources, les hommes sauvages n’avaient pas le loisir de combiner des rapports et des raisonnemens : affectés de plus de maux qu’ils n’éprouvaient de jouissances, leur sentiment le plus habituel était la crainte, leur théologie la terreur ; leur culte se bornait à quelques pratiques de salut, d’offrande à des êtres qu’ils se peignaient féroces et avides comme eux. Dans leur état d’égalité et d’indépendance, nul ne s’établissait médiateur auprès de dieux nsubordonnés et pauvres comme lui-même. Nul n’ayant de superflu à donner, il n’existait ni parasite sous le nom de prêtre, ni tribut sous le nom de victime, ni empire sous le nom d’autel ; le dogme et la morale confondus n’étaient que la conservation


de soi-même ; et la religion, idée arbitraire, sans influence sur les rapports des hommes entr’eux, n’était qu’un vain hommage rendu aux puissances visibles de la nature. Telle fut l’origine nécessaire et première de toute idée de la divinité. Et l’orateur s’adressant aux nations sauvages : " nous vous le demandons, hommes qui n’avez pas reçu d’idées étrangères et factices ; dites-nous si jamais vous vous en êtes formé d’autres ? Et vous, docteurs, nous vous en attestons ; dites-nous si tel n’est pas le témoignage unanime de tous les anciens monumens " ?