la première invention de l’esprit. Ainsi, pour avertir de l’inondation et du besoin de s’en préserver, l’on avait peint une nacelle, le navire argo. Pour désigner le vent, l’on avait peint une aîle d’oiseau : pour spécifier la saison, le mois, l’on avait peint l’oiseau de passage, l’insecte, l’animal qui apparaissait à cette époque : pour exprimer l’hiver, on peignit un porc, un serpent, qui se plaisent dans les lieux humides ; et la réunion de ces figures avait des sens convenus de phrases et de mots. Mais comme ce sens ne portait
par lui-même rien de fixe et de précis ; comme
le nombre de ces figures et de leurs combinaisons
devint excessif, et surchargea la mémoire, il en
résulta d’abord des confusions,
des explications fausses. Ensuite, le génie ayant
inventé l’art plus simple d’appliquer les signes
aux sons dont le nombre est limité, et de peindre
la parole au lieu des pensées, l’écriture
alphabétique fit tomber en désuétude les
peintures hiéroglyphiques ; et, de jour en
jour, leurs significations oubliées donnèrent lieu
à une foule d’illusions, d’équivoques et d’erreurs.
Enfin, une troisième cause de confusion fut
l’organisation civile des anciens états. En effet,
lorsque les peuples commencèrent de se livrer
à l’agriculture, la formation du calendrier rural
exigeant des observations astronomiques continues,
il fut nécessaire d’y préposer quelques
individus chargés de veiller à l’apparition et au
coucher de certaines étoiles ; d’avertir du retour