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LES RUINES.

gez la terre et les cieux de l’homme qui les calomnie !

« Quelle est-elle, cette aveugle fatalité qui, sans règle et sans lois, se joue du sort des mortels ? Quelle est cette nécessité injuste qui confond l’issue des actions, et de la prudence, et de la folie ? En quoi consistent ces anathèmes célestes sur ces contrées ? Où est cette malédiction divine qui perpétue l’abandon de ces campagnes ? Dites, monuments des temps passés ! les cieux ont-ils changé leurs lois, et la terre sa marche ? Le soleil a-t-il éteint ses feux dans l’espace ? Les mers n’élèvent-elles plus leurs nuages ? Les pluies et les rosées demeurent-elles fixées dans les airs ? Les montagnes retiennent-elles leurs sources ? Les ruisseaux se sont-ils taris ? et les plantes sont-elles privées de semences et de fruits ? Répondez, race de mensonge et d’iniquité, Dieu a-t-il troublé cet ordre primitif et constant qu’il assigna lui-même à la nature ? Le ciel a-t-il dénié à la terre, et la terre à ses habitants, les biens que jadis ils leur accordèrent ? Si rien n’a changé dans la création, si les mêmes moyens qui existèrent subsistent encore, à quoi tient donc que les races présentes ne soient ce que furent les races passées ? Ah ! c’est faussement que vous accusez le sort et la Divinité ! c’est à tort que vous reportez à Dieu la cause de vos maux ! Dites, race perverse et hypocrite ! si ces lieux sont désolés, si