Ton intérêt.
Les enfers et les cieux seront unis ensemble.
L’intérêt est ton dieu, le mien est l’équité ;
Entre ces ennemis il n’est point de traité.
Quel serait le ciment, réponds-moi, si tu l’oses,
De l’horrible amitié qu’ici tu me proposes ?
Réponds ; est-ce ton fils que mon bras te ravit ?
Est-ce le sang des miens que ta main répandit ?
Oui, ce sont tes fils même. Oui, connais un mystère
Dont seul dans l’univers je suis dépositaire :
Tu pleures tes enfants, ils respirent tous deux.
Ils vivraient ! qu’as-tu dit ? ô ciel ! ô jour heureux !
Ils vivraient ! c’est de toi qu’il faut que je l’apprenne !
Élevés dans mon camp, tous deux sont dans ma chaîne.
Mes enfants dans tes fers ! Ils pourraient te servir !
Mes bienfaisantes mains ont daigné les nourrir.
Quoi ! tu n’as point sur eux étendu ta colère ?
Je ne les punis point des fautes de leur père.
Achève, éclaircis-moi, parle, quel est leur sort ?
Je tiens entre mes mains et leur vie et leur mort ;
Tu n’as qu’à dire un mot, et je t’en fais l’arbitre.
Moi, je puis les sauver ! à quel prix ? à quel titre ?
Faut-il donner mon sang ? faut-il porter leurs fers ?
Non, mais il faut m’aider à tromper l’univers ;
Il faut rendre la Mecque, abandonner ton temple,
De la crédulité donner à tous l’exemple,
Annoncer l’Alcoran aux peuples effrayés,
Me servir en prophète, et tomber à mes pieds :
Je te rendrai ton fils, et je serai ton gendre.