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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/19

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ACTE I, SCÈNE II.

Allez : votre présence en ces funestes lieux
Augmente ma douleur, et blesse trop mes yeux.
Mohadir… ah ! partez.

mohadir.

Hélas ! je vais peut-être
Porter les derniers coups au sein qui vous fit naître !


Scène II

ZULIME, ATIDE.
zulime.

Ah ! je succombe, Atide ; et ce cœur désolé
Ne soutient plus le poids dont il est accablé.
Vous voyez ce que j’aime, et ce que je redoute ;
Une patrie, un père ; Atide ! ah, qu’il en coûte !
Que de retours sur moi ! que de tristes efforts !
Je n’ai dans mon amour senti que des remords[1].
D’un père infortuné vous concevez l’injure ;
Il est affreux pour moi d’offenser la nature ;
Mais Ramire expirait, vous étiez en danger.
Est-ce un crime, après tout, que de vous protéger ?
Je dois tout à Ramire ; il a sauvé ma vie.
A ce départ enfin vous m’avez enhardie :
Vos périls, vos vertus, vos amis malheureux.
Tant de motifs puissants, et l’amour avec eux,
L’amour qui me conduit ; hélas ! si l’on m’accuse.
Voilà tous mes forfaits : mais voilà mon excuse.
Je tremble cependant ; de pleurs toujours noyés,
De l’abîme où je suis mes yeux sont effrayés.

atide.

Hélas ! Ramire et moi nous vous devons la vie ;
Vous rendez un héros, un prince à sa patrie ;
Le ciel peut-il haïr un soin si généreux ?
Arrachez votre amant à ces bords dangereux.
Ma vie est peu de chose ; et je ne suis encore
Qu’une esclave tremblante en des lieux que j’abhorre.

  1. Phèdre dit dans Racine, acte IV, scène vi :
    Hélas ! du crime affreux dont la honte me suit,
    Jamais mon triste cœur n’a recueilli le fruit.