Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/251

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Fils des rois et des dieux, mon fils, il faut servir.
Pour savoir se venger, il faut savoir souffrir.
Je sens que ma faiblesse et t'indigne et t'outrage ;
Je t'en aime encor plus, et je crains davantage.
Mon fils...

Égisthe

Osez me suivre.

Mérope

Arrête. Que fais-tu ?  
Dieux ! Je me plains à vous de son trop de vertu.

Égisthe

Voyez-vous en ces lieux le tombeau de mon père ?
Entendez-vous sa voix ? êtes-vous reine et mère ?
Si vous l'êtes, venez.

Mérope

Il semble que le ciel
T'élève en ce moment au-dessus d'un mortel. 
Je respecte mon sang ; je vois le sang d'Alcide ;
Ah ! Parle : remplis-moi de ce dieu qui te guide.
Il te presse, il t'inspire. ô mon fils ! Mon cher fils !
Achève, et rends la force à mes faibles esprits.

Égisthe

Auriez-vous des amis dans ce temple funeste ?

Mérope 

J'en eus quand j'étais reine, et le peu qui m'en reste
Sous un joug étranger baisse un front abattu ;
Le poids de mes malheurs accable leur vertu :
Polyphonte est haï ; mais c'est lui qu'on couronne :
On m'aime, et l'on me fuit.

Égisthe

Quoi ! Tout vous abandonne !
Ce monstre est à l'autel ?

Mérope

Il m'attend.

Égisthe

Ses soldats
À cet autel horrible accompagnent ses pas ?

Mérope

Non : la porte est livrée à leur troupe cruelle ;
Il est environné de la foule infidèle
Des mêmes courtisans que j'ai vus autrefois
S'empresser à ma suite, et ramper sous mes lois.