Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/485

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

AVERTISSEMENT

POUR LA PRÉSENTE ÉDITION.

Voltaire, irrité d’entendre appeler l’auteur ù’Alrée et Thyesle le Sophocle du siècle, sachant d’ailleurs que certaines gens, et parmi eux Marivaux, disaient que tout son bel esprit devait pâlir et s’éclipser devant le génie de Crébillon, avait juré de ne pas laisser debout une de ses pièces, et de démontrer jusqu’à l’évidence la plus brutale la distance qui les séparait l’un de l’autre, en refaisant successivement toutes les tragédies du vieux poëte... Le refus d’approbation de Mahomet est son grand grief contre Crébillon, qui déclara, en qualité de censeur, la pièce inacceptable ; et il ne le lui pardonna pas. Ce qu’il ne lui pardonna pas davantage, ce fut d’avoir à partager avec lui les faveurs de M"** de Pompadour, qui bientôt même inclinera du côté de l’auteur de Calilina, plus par politique peut-être que par entraînement. On lui opposait ce poëte rocailleux, incorrect, barbare, que l’on affectait de considérer comme notre troisième tragique ; il saurait démasquer l’envie et prouver qu’entre l’auteur d’Electre et lui il y avait des abîmes ! 9

C’est ainsi que M. G. Desnoiresterres explique l’origine de cette tragédie, et il n’y en a point d’autre explication, malgré le singulier roman que M. Michelet a imaginé à ce propos. Crébillon avait fait représenter sa Sémiramis le 10 avril 1747. Ce n’était pas la première foiâ que ce sujet avait été traité. Il y avait eu deux tragédies de Sëmiramis assez remarquables au siècle précédent, l’une de Gilbert, représentée en 4 647, l’autre par Desfontaines, qui ne parait pas avoir été représentée, et qui fut imprimée la même année 1647 sous le titre de la Véritable Sëmiramis, Un peu plus d’une année avant de jouer l’œuvre de Crébillon, les mêmes comédiens avaient donné une Sëmiramis romanesque et très-faible, de M"** de Gomez, tragédie qui n’avait eu que trois représentations.

La Sëmiramis de Crébillon n’en eut que sept dans sa nouveauté. Sëmiramis n’est pas la meilleure pièce de Crébillon : Rfuidamiste, Electre, Atrëe et Thyeste, sont bien supérieures. Il était certainement permis à un écrivain de traiter le même sujet après un intervalle de trente et un ans.

Continuons de citer M. Desnoiresterres : à Encore fallait-il être joué. Voltaire prendra d’abord ses sûretés contre l’auteur de la première Sëmi Théâtre. III. 31