seul ne se borna pas là ; c’est un homme de beaucoup d’esprit, il fait des vers, il a des amis qui en font : il paya le roi de Prusse en même monnaie, et m’envoya une ode contre Frédéric, aussi mordante, aussi terrible que l’était celle de Frédéric contre nous. En voici des échantillons détachés :
Ce n’est plus cet heureux génie[1]
Qui des arts, dans la Germanie,
Devait allumer le flambeau ;
Époux, fils, et frère coupable,
C’est celui qu’un père équitable
Voulut étouffer au berceau.
- ↑ Palissot (voyez la note, page 60) a fait imprimer son ode en entier, à la suite d’une édition de la Danciade, Paris, Barrois l’aîné, an V (1797), in-18. Elle ne se trouve dans aucune édition des œuvres complètes de cet auteur, pas même dans celle qu’il a donnée en 1809, six volumes in-8o. Palissot remarque que parmi les quatre strophes rapportées par Voltaire, « une de ces strophes est défigurée au point de n’avoir aucun sens, soit par une inadvertance d’imprimeur, soit que la copie adressée furtivement à Voltaire fût très-infidèle ». Voici ces strophes, telles que l’auteur les a données :
5.
Ce n’est plus cet heureux génie
Qui des arts, dans la Germanie,
Devait allumer le flambeau :
Époux, fils, et frère coupable.
C’est lui que son père équitable
Voulut étouffer au berceau.14.
Jaloux d’une double couronne,
Il ose, infidèle à Bellone,
Courir sur les pas d’Apollon ;
Dût-il des sommets du Parnasse,
Pour expier sa folle audace,
Subir le sort de Phaéton.16.
Vois, malgré la garde romaine,
Néron poursuivi sur la scène
Par le mépris des légions ;
Vois l’oppresseur de Syracuse,
Denis, prostituant sa muse
Aux insultes des nations.19.
Jusque-là, censeur moins sauvage,
Souffre l’innocent badinage
De la Nature et des Amours.
Peux-tu condamner la tendresse,
Toi qui n’en as connu l’ivresse
Que dans les bras de tes tambours ?