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DOCUMENTS BIOGRAPHIQUES.

Nous déclarons la présente copie conforme à l’original, qui est demeuré entre les mains de l’abbé Gaultier, et que nous avons signé l’un et l’autre, comme nous signons le présent certificat. Fait à Paris, le 27 mai 1778. Signé : L’abbé Mignot, Villevieille.

L’original ci-dessus mentionné a été présenté à monsieur le curé de Saint-Sulpice, qui en a tiré copie. Signé : L’abbé Mignot, Villevieille.



LXIX.


VOLTAIRE À L’ACADÉMIE
ET À LA COMÉDIE-FRANÇAISE
le 30 mars 1778[1].
Ce lundi 30.

Non, je ne crois pas qu’en aucun temps le génie et les lettres aient pu s’honorer d’un triomphe plus flatteur et plus touchant que celui dont M. de Voltaire vient de jouir après soixante ans de travaux, de gloire et de persécution.

Cet illustre vieillard a paru aujourd’hui pour la première fois à l’Académie et au spectacle. Un accident très-grave[2], et qui avait fait craindre pendant plusieurs jours pour sa vie, ne lui avait pas permis de s’y rendre plus tôt. Son carrosse a été suivi dans les cours du Louvre par une foule de peuple empressé à le voir. Il a trouvé toutes les portes, toutes les avenues de l’Académie, assiégées d’une multitude qui ne s’ouvrait que lentement à son passage, et se précipitait aussitôt sur ses pas avec des applaudissements et des acclamations multipliés. L’Académie est venue au-devant de lui jusque dans la première salle, honneur qu’elle n’avait jamais fait à aucun de ses membres, pas même aux princes étrangers qui ont daigné assister à ses assemblées. On l’a fait asseoir à la place du directeur, et, par un choix unanime, on l’a pressé de vouloir bien en accepter la charge, qui allait être vacante à la fin du trimestre de janvier. Quoique l’Académie soit dans l’usage de faire tirer cette charge au sort, elle a jugé, sans doute avec raison, que déroger ainsi à ses coutumes en faveur d’un grand homme, c’était suivre en effet l’esprit et les intentions de leur fondateur. M. de Voltaire a reçu cette distinction avec beaucoup de reconnaissance, et la lecture que lui a faite ensuite M. d’Alembert de l’Éloge de Boileau a paru l’intéresser infiniment. Il y a dans cet éloge une discussion très-fine sur le progrès que le législateur du goût, dans le dernier siècle, a fait faire à notre langue. On y

  1. Correspondance de Grimm, édition Tourneux, tome XII, p. 68.
  2. Une violente hémorragie, occasionnée vraisemblablement par toutes les fatigues qu’il a essuyées depuis son arrivée à Paris, et surtout par les efforts qu’il a faits dans une répétition que les Comédiens firent chez lui de sa tragédie d’Irène, répétition qui lui a donné beaucoup d’impatience et beaucoup d’humeur. (Meister.)