Il se peut que la circonférence de Babylone ait été de vingt-quatre de nos lieues moyennes ; mais qu’un Ninus ait bâti sur le Tigre, si près de Babylone, une ville appelée Ninive d’une étendue aussi grande, c’est ce qui ne paraît pas croyable. On nous parle de trois puissants empires qui subsistaient à la fois : celui de Babylone, celui d’Assyrie ou de Ninive, et celui de Syrie ou de Damas. La chose est peu vraisemblable ; c’est comme si l’on disait qu’il y avait à la fois dans une partie de la Gaule trois puissants empires, dont les capitales, Paris, Soissons, et Orléans, avaient chacune vingt-quatre lieues de tour.
J’avoue que je ne comprends rien aux deux empires de Babylone et d’Assyrie. Plusieurs savants, qui ont voulu porter quelques lumières dans ces ténèbres, ont affirmé que l’Assyrie et la Chaldée n’étaient que le même empire, gouverné quelquefois par deux princes, l’un résidant à Babylone, l’autre à Ninive ; et ce sentiment raisonnable peut être adopté, jusqu’à ce qu’on en trouve un plus raisonnable encore.
Ce qui contribue à jeter une grande vraisemblance sur l’antiquité de cette nation, c’est cette fameuse tour élevée pour observer les astres. Presque tous les commentateurs, ne pouvant contester ce monument, se croient obligés de supposer que c’était un reste de la tour de Babel que les hommes voulurent élever jusqu’au ciel. On ne sait pas trop ce que les commentateurs entendent par le ciel : est-ce la lune ? est-ce la planète devenus ? Il y a loin d’ici là. Voulaient-ils seulement élever une tour un peu haute ? Il n’y a là ni aucun mal ni aucune difficulté, supposé qu’on ait beaucoup d’hommes, beaucoup d’instruments et de vivres.
La tour de Babel, la dispersion des peuples, la confusion des langues, sont des choses, comme on sait, très-respectables, auxquelles nous ne touchons point. Nous ne parlons ici que de l’observatoire, qui n’a rien de commun avec les histoires juives.
Si Nabonassar éleva cet édifice, il faut au moins avouer que les Chaldéens eurent un observatoire plus de deux mille quatre cents ans avant nous. Concevez ensuite combien de siècles exige la lenteur de l’esprit humain pour en venir jusqu’à ériger un tel monument aux sciences.
Ce fut en Chaldée, et non en Égypte, qu’on inventa le zodiaque. Il y en a, ce me semble, trois preuves assez fortes : la première, que les Chaldéens furent une nation éclairée, avant que l’Égypte, toujours inondée par le Nil, pût être habitable ; la seconde, que les signes du zodiaque conviennent au climat de la Mésopotamie, et