sur ce prétexte, quiconque, étant sans crédit et étant suspect, ne voulut pas se racheter de ses persécutions. Le peuple, souvent bon juge de ceux qui en imposent aux rois, ne l’appelait que Robert le B.....[1]. Il fut enfin reconnu : ses iniquités et ses infamies furent publiques ; mais ce qui vous indignera, c’est qu’il ne fut condamné qu’à une prison perpétuelle; et ce qui pourrait encore vous indigner, c’est que le jésuite Daniel ne parle point de cet homme dans son Histoire de France.
C’est donc ainsi que l’Inquisition commença en Europe : elle
ne méritait pas un autre berceau. Vous sentez assez que c’est le
dernier degré d’une barbarie brutale et absurde de maintenir,
par des délateurs et des bourreaux, la religion d’un Dieu que des
bourreaux firent périr. Cela est presque aussi contradictoire que
d’attirer à soi les trésors des peuples et des rois au nom de ce
même Dieu qui naquit et qui vécut dans la pauvreté. Vous verrez
dans un chapitre à part ce qu’a été l’Inquisition en Espagne et
ailleurs, et jusqu’à quel excès la barbarie et la rapacité de quelques hommes ont abusé de la simplicité des autres.
Nous avons vu que les croisades épuisèrent l’Europe d’hommes et d’argent, et ne la civilisèrent pas. L’Allemagne fut dans une entière anarchie depuis la mort de Frédéric II. Tous les seigneurs s’emparèrent à l’envi des revenus publics attachés à l’empire ; de sorte que quand Rodolphe de Habsbourg fut élu (1273), on ne lui accorda que des soldats, avec lesquels il conquit l’Autriche sur Ottocare, qui l’avait enlevée à la maison de Bavière.
C’est pendant l’interrègne qui précéda l’élection de Rodolphe que le Danemark, la Pologne, la Hongrie, s’affranchissent entièrement des légères redevances qu’elles payaient aux empereurs, quand ceux-ci étaient les plus forts.
- ↑ On commençait alors à donner ce nom indifféremment aux sodomites et aux hérétiques. (Note de Voltaire.)