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DE L’ITALIE À LA FIN DU XVIe SIÈCLE.

À Pie IV succéda ce dominicain Ghisleri, Pie V, si haï dans Rome même pour y avoir fait exercer avec trop de cruauté le ministère de l’Inquisition, publiquement combattu ailleurs par les tribunaux séculiers. La fameuse bulle In cœna Domini, émanée sous Paul III, et publiée par Pie V, dans laquelle on brave tous les droits des souverains, révolta plusieurs cours, et fit élever contre elle les voix de plusieurs universités.

L’extinction de l’ordre des humiliés fut un des principaux événements de son pontificat. Les religieux de cet ordre, établis principalement au Milanais, vivaient dans le scandale. Saint Charles Borromée, archevêque de Milan, voulut les réformer : quatre d’entre eux conspirèrent contre sa vie ; l’un des quatre lui tira un coup d’arquebuse dans son palais, pendant qu’il faisait sa prière (1571). Ce saint homme, qui ne fut que légèrement blessé, demanda au pape la grâce des coupables ; mais le pape punit leur attentat par le dernier supplice, et abolit l’ordre entier. Ce pontife envoya quelques troupes en France au secours du roi Charles IX contre les huguenots de son royaume. Elles se trouvèrent à la bataille de Moncontour. Le gouvernement de France était alors parvenu à cet excès de subvertissement que deux mille soldats du pape étaient un secours utile.

Mais ce qui consacra la mémoire de Pie V, ce fut son empressement à défendre la chrétienté contre les Turcs, et l’ardeur dont il pressa l’armement de la flotte qui gagna la bataille de Lépante. Son plus bel éloge vint de Constantinople même, où l’on fit des réjouissances publiques de sa mort.

Grégoire XIII, Buoncompagno, successeur de Pie V, rendit son nom immortel par la réforme du calendrier qui porte son nom ; et en cela il imita Jules César. Ce besoin où les nations furent toujours de réformer l’année montre bien la lenteur des arts les plus nécessaires. Les hommes avaient su ravager le monde d’un bout à l’autre, avant d’avoir su connaître les temps et régler