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HENRI VII.
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chevaliers qui faisaient vœu de combattre pour Jésus-Christ sont accusés de le renier, d’adorer une tête de cuivre, et de n’avoir, pour cérémonies secrètes de leur réception dans l’ordre, que les plus horribles débauches. Ils sont condamnés au feu en France, en conséquence d’une bulle du pape Clément V, et de leurs grands biens. Le grand-maître de l’ordre, Jacques de Molai, Gui, frère du dauphin d’Auvergne, et soixante et quatorze chevaliers, jurèrent en vain que l’ordre était innocent : Philippe le Bel, irrité contre eux, les fit trouver coupables. Le pape, dévoué au roi de France, les condamna ; il y en eut cinquante-neuf de brûlés à Paris : on les poursuivit partout. Le pape abolit l’ordre deux ans après[1] ; mais en Allemagne, on ne fit rien contre eux ; peut-être parce qu’on les persécutait trop en France. Il y a grande apparence que les débauches de quelques jeunes chevaliers avaient donné occasion de calomnier l’ordre entier. Cette Saint-Barthélemy de tant de chevaliers armés pour la défense du christianisme, jugés en France, et condamnés par un pape et par des cardinaux, est la plus abominable cruauté qui ait été jamais exercée au nom de la justice. On ne trouve rien de pareil chez les peuples les plus sauvages : ils tuent dans la colère ; mais les juges très-incompétents des templiers les livrèrent gravement aux plus affreux supplices, sans passion comme sans raison.

Henri VII veut rétablir l’empire en Italie. Aucun empereur n’y avait été depuis Frédéric II.

Diète à Francfort pour établir Jean de Luxembourg, roi de Bohême, vicaire de l’empire, et pour fournir au voyage de l’empereur ; ce voyage s’appelle, comme on sait, l’expédition romaine. Chaque État de l’empire se cotise pour fournir des soldats, des cavaliers, ou de l’argent.

Les commissaires de l’empereur, qui le précèdent, font à Lausanne, le 11 octobre, le serment accoutumé aux commissaires du pape : serment regardé toujours par les papes comme un acte d’obéissance et un hommage, et par les empereurs comme une promesse de protection ; mais les paroles en étaient favorables aux prétentions des papes.

1311-1312. Les factions des guelfes et des gibelins partageaient toujours l’Italie ; mais ces factions n’avaient plus le même objet qu’autrefois ; elles ne combattaient plus l’une pour l’empereur, l’autre pour le pape ; ce n’était plus qu’un mot de ralliement, auquel il n’y avait guère d’idée fixe attachée. C’est de quoi nous

  1. Voyez année 1313.