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ANNALES DE L’EMPIRE.

L’éleclorat donné, comme on a vu[1], à la branche cadette, devait être l’objet des regrets de l’aînée. Un gentilhomme nommé Groumbach, proscrit avec plusieurs de ses complices pour quelques crimes, s’était retiré à Gotha, chez Jean-Frédéric, fils de ce Jean-Frédéric[2] à qui la bataille de Muhlberg avait fait perdre le duché et l’électorat de Saxe.

Groumbach avait principalement en vue de se venger de l’électeur de Saxe Auguste, chargé de faire exécuter contre lui l’arrêt de sa proscription. Il était associé avec plusieurs brigands qui avaient vécu avec lui de rapines et de pillage. Il forme avec eux une conspiration pour assassiner l’électeur[3]. Un des conjurés, pris à Dresde, avoua le complot. L’électeur Auguste, avec une commission de l’empereur, fait marcher ses troupes à Gotha. Groumbach, que le duc de Gotha soutenait, était dans la ville avec plusieurs soldats déterminés, attachés à sa fortune. Les troupes du duc et les bourgeois défendirent la ville ; mais enfin il fallut se rendre. Le duc Jean-Frédéric, aussi malheureux que son père, est arrêté, conduit à Vienne dans une charrette avec un bonnet de paille attaché sur sa tête, ensuite à Naples ; et ses États sont donnés à Jean-Guillaume son frère. Pour Groumbach et ses complices, ils furent tous exécutés à mort.

1568. Les troubles des Pays-Bas augmentaient. Le prince d’Orange, Guillaume le Taciturne, déjà chef de parti, qui fonda la république des Provinces-Unies, s’adresse à l’empereur, connue au premier souverain des Pays-Bas, toujours regardés comme appartenants à l’empire : et en effet l’empereur envoie en Espagne son frère Charles d’Autriche, archiduc de Gratz, pour adoucir l’esprit de Philippe II ; mais il ne put ni fléchir le roi d’Espagne, ni empêcher que la plupart des princes protestants d’Allemagne n’envoyassent du secours au prince d’Orange.

Le duc d’Albe, gouverneur sanguinaire des Pays-Bas, presse l’empereur de lui livrer le prince d’Orange, qui alors levait des troupes en Allemagne, Maximilien répond que, l’empire ayant la juridiction suprême sur les Pays-Bas, c’est à la diète impériale qu’il faut s’adresser. Une telle réponse montre assez que le prince d’Orange n’était pas un homme qu’on pût arrêter.

L’empereur laisse le prince d’Orange faire la guerre dans les

  1. Année 1547.
  2. L’électeur, dépossédé en 1547, s’appelait Jean-Frédéric-Henri ; voyez page 519.
  3. Voltaire, par égard pour la duchesse de Saxe-Gotha, ne dit pas que Jean-Frédéric avait approuvé le projet. (G. A.)