Toi que je fis dès mon enfance
Le maître de mes plus beaux jours,
D’en laisser terminer le cours
À l’ennuyeuse indifférence ?
Alors j’aperçus dans les airs
L’enfant maître de l’univers,
Qui, plein d’une joie inhumaine,
Me dit en souriant : « Tircis, ne te plains plus,
Je vais mettre fin à ta peine,
Je te promets un regard de Caylus. »
Né en 1644, mort le 22 mai 1712.
La Fayette (Marie-Magdeleine Pioche de La Vergne, comtesse de). Sa Princesse de Clèves et sa Zaïde furent les premiers romans où l’on vit les mœurs des honnêtes gens, et des aventures naturelles décrites avec grâce. Avant elle on écrivait d’un style ampoulé des choses peu vraisemblables. Morte en 1693.
La Fontaine (Jean), né à Château-Thierry en 1621 ; le plus simple des hommes, mais admirable dans son genre, quoique négligé et inégal. Il fut le seul des grands hommes de son temps qui n’eut point de part aux bienfaits de Louis XIV. Il y avait droit par son mérite et par sa pauvreté. Dans la plupart de ses fables, il est infiniment au-dessus de tous ceux qui ont écrit avant et après lui, en quelque langue que ce puisse être. Dans les contes qu’il a imités de l’Arioste, il n’a pas son élégance et sa pureté ; il n’est pas, à beaucoup près, si grand peintre, et c’est ce que Boileau n’a pas aperçu dans sa Dissertation sur Joconde, parce que Despréaux ne savait presque pas l’italien ; mais dans les contes puisés chez Boccace, La Fontaine lui est bien supérieur, parce qu’il a beaucoup plus d’esprit, de grâces, de finesse. Boccace n’a d’autre mérite que la naïveté, la clarté et l’exactitude dans le langage. Il a fixé sa langue, et La Fontaine a souvent corrompu la sienne. Mort en 1695.
Il faut que les jeunes gens, et surtout ceux qui dirigent leurs lectures, prennent bien garde à ne pas confondre avec son beau naturel, le familier, le bas, le négligé, le trivial : défauts dans lesquels il tombe trop souvent. Il commence par dire au Dauphin dans son prologue :
Et si de t’agréer je n’emporte le prix,
J’aurai du moins l’honneur de l’avoir entrepris.
On sent assez qu’il n’y aurait nul honneur à ne pas emporter le