lippe IV n’avait alors de son second mariage qu’un fils, dont l’enfance malsaine faisait craindre pour sa vie. On voulait que l’infante, qui pouvait être héritière de tant d’États, portât ses droits dans la maison d’Autriche, et non dans une maison ennemie ; mais enfin Philippe IV ayant eu un autre fils, don Philippe Prosper, et sa femme étant encore enceinte, le danger de donner l’infante au roi de France lui parut moins grand, et la bataille des Dunes lui rendit la paix nécessaire.
Les Espagnols promirent l’infante, et demandèrent une suspension d’armes. Mazarin et don Louis se rendirent sur les frontières d’Espagne et de France, dans l’Île des Faisans (1659). Quoique le mariage d’un roi de France et la paix générale fussent l’objet de leurs conférences, cependant plus d’un mois se passa à arranger les difficultés sur la préséance, et à régler des cérémonies. Les cardinaux se disaient égaux aux rois, et supérieurs aux autres souverains. La France prétendait avec plus de justice la prééminence sur les autres puissances. Cependant don Louis de Haro mit une égalité parfaite entre Mazarin et lui, entre la France et l’Espagne.
Les conférences durèrent quatre mois. Mazarin et don Louis y déployèrent toute leur politique : celle du cardinal était la finesse ; celle de don Louis, la lenteur. Celui-ci ne donnait presque jamais de paroles, et celui-là en donnait toujours d’équivoques. Le génie du ministre italien était de vouloir surprendre ; celui de l’espagnol était de s’empêcher d’être surpris. On prétend qu’il disait du cardinal : « Il a un grand défaut en politique, c’est qu’il veut toujours tromper. »
Telle est la vicissitude des choses humaines que de ce fameux traité des Pyrénées il n’y a pas deux articles qui subsistent aujourd’hui. Le roi de France garda le Roussillon, qu’il aurait toujours conservé sans cette paix ; mais, à l’égard de la Flandre, la monarchie espagnole n’y a plus rien. La France était alors l’amie nécessaire du Portugal ; elle ne l’est plus : tout est changé. Mais si don Louis de Haro avait dit que le cardinal Mazarin savait tromper, on a dit depuis qu’il savait prévoir. Il méditait dès longtemps l’alliance des maisons de France et d’Espagne. On cite cette fameuse lettre de lui, écrite pendant les négociations de Munster : « Si le roi très-chrétien pouvait avoir les Pays-Bas et la Franche-Comté en dot, en épousant l’infante, alors nous pourrions aspirer à la succession d’Espagne, quelque renonciation qu’on fît faire à l’infante : et ce ne serait pas une attente fort éloignée, puisqu’il n’y a que la vie du prince son frère qui