son fils le dauphin, qu’on nommait Monseigneur : prince doux dans ses mœurs, modeste dans sa conduite, qui paraissait tenir en tout de sa mère. Il était âgé de vingt-sept ans. C’était pour la première fois qu’on lui confiait un commandement, après s’être bien assuré, par son caractère, qu’il n’en abuserait pas. Le roi lui dit publiquement à son départ (22 septembre 1688) : « Mon fils, en vous envoyant commander mes armées, je vous donne les occasions de faire connaître votre mérite ; allez le montrer à toute l’Europe, afin que, quand je viendrai à mourir, on ne s’aperçoive pas que le roi soit mort. »
Ce prince eut une commission spéciale pour commander, comme s’il eût été simplement l’un des généraux que le roi eût choisi. Son père lui écrivait : « À mon fils le dauphin, mon lieutenant général, commandant mes armées en Allemagne. »
On avait tout prévu et tout disposé pour que le fils de Louis XIV, contribuant à cette expédition de son nom et de sa présence, ne reçût pas un affront. Le maréchal de Duras commandait réellement l’armée. Boufflers avait un corps de troupes en deçà du Rhin ; le maréchal d’Humières, un autre vers Cologne, pour observer les ennemis. Heidelberg, Mayence, étaient pris. Le siège de Philipsbourg, préalable toujours nécessaire quand la France fait la guerre à l’Allemagne, était commencé. Vauban conduisait le siège. Tous les détails qui n’étaient point de son ressort roulaient sur Catinat, alors lieutenant général, homme capable de tout, et fait pour tous les emplois. Monseigneur arriva après six jours de tranchée ouverte. Il imitait la conduite de son père, s’exposant autant qu’il le fallait, jamais en téméraire, affable à tout le monde, libéral envers les soldats. Le roi goûtait une joie pure d’avoir un fils qui l’imitait sans l’effacer, et qui se faisait aimer de tout le monde sans se faire craindre de son père.
Philipsbourg fut pris en dix-neuf jours[1] ; on prit Manheim en trois jours (11 novembre 1688) ; Franckendal en deux ; Spire, Trêves, Vorms, et Oppenheim, se rendirent dès que les Français furent à leurs portes (15 novembre 1688).
Le roi avait résolu de faire un désert du Palatinat dès que ces villes seraient prises. Il avait la vue d’empêcher les ennemis d’y subsister, plus que celle de se venger de l’électeur palatin, qui n’avait d’autre crime que d’avoir fait son devoir en s’unissant au reste de l’Allemagne contre la France. (Février 1689) Il vint à l’armée un ordre de Louis, signé Louvois, de tout réduire
- ↑ Le 29 octobre.