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AUTELS.


Ces flagellants inondèrent l’Europe : on en voit encore beaucoup en Italie, en Espagne[1] et en France même, à Perpignan. Il était assez commun, au commencement du xvie siècle, que les confesseurs fouettassent leurs pénitentes sur les fesses. Une histoire des Pays-Bas, composée par Meteren[2] rapporte que le cordelier nommé Adriacem, grand prédicateur de Bruges, fouettait ses pénitentes toutes nues.

Le jésuite Edmond Auger, confesseur de Henri III[3], engagea ce malheureux prince à se mettre à la tête des flagellants.

Dans plusieurs couvents de moines et de religieuses on se fouette sur les fesses. Il en a résulté quelquefois d’étranges impudicités, sur lesquelles il faut jeter un, voile pour ne pas faire rougir celles qui portent un voile sacré, et dont le sexe et la profession méritent les plus grands égards[4].


AUTELS,
Temples, rites, sacrifices, etc.[5].

Il est universellement reconnu que les premiers chrétiens n’eurent ni temples, ni autels, ni cierges, ni encens, ni eau bénite, ni aucun des rites que la prudence des pasteurs institua depuis, selon les temps et les lieux, et surtout selon le besoin des fidèles.

Nous avons plus d’un témoignage d’Origène, d’Athénagore, de Théophile, de Justin, de Tertullien, que les premiers chrétiens avaient en abomination les temples et les autels. Ce n’est pas seulement parce qu’ils ne pouvaient obtenir du gouvernement, dans ces commencements, la permission de bâtir des temples ; mais c’est qu’ils avaient une aversion réelle pour tout ce qui semblait avoir le moindre rapport avec les autres religions. Cette horreur subsista chez eux pendant deux cent cinquante ans. Cela se démontre par Minucius Félix, qui vivait au iiie siècle. « Vous pensez, dit-il aux Romains, que nous cachons ce que nous adorons, parce que nous n’avons ni temples ni autels. Mais quel simulacre érigerons-nous à Dieu, puisque l’homme est lui-même

  1. Histoire des flagellants, page 198. (Note de Voltaire.)
  2. Meteren, Historia Belgica, anno 1570. (Id.)
  3. De Thou, livre XXVIII. (Id.)
  4. Voyez Expiation. (Id.)
  5. Questions sur l’Encyclopédie, deuxième partie, 1770. (B.)