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DE DIODORE, ET D’HÉRODOTE.

Plaute et de Térence ne subsistait plus. Ce qu’on appelle aujourd’hui la comédie ou la farce italienne, semble avoir pris naissance dans ce temps-là. Saint Genest représentait un malade : le médecin lui demandait ce qu’il avait : « Je me sens pesant, dit Genest. — Veux-tu que nous te rabotions pour te rendre plus léger ? lui dit le médecin. — Non, répondit Genest, je veux mourir chrétien, pour ressusciter avec une belle taille. » Alors des acteurs habillés en prêtres et en exorcistes viennent pour le baptiser ; dans le moment Genest devint en effet chrétien, et au lieu d’achever son rôle, il se mit à prêcher l’empereur et le peuple. Ce sont encore les Actes sincères qui rapportent ce miracle.

Il est certain qu’il y eut beaucoup de vrais martyrs ; mais aussi il n’est pas vrai que les provinces fussent inondées de sang, comme on se l’imagine. Il est fait mention d’environ deux cents martyrs, vers ces derniers temps de Dioclétien, dans toute l’étendue de l’empire romain, et il est avéré, par les lettres de Constantin même, que Dioclétien eut bien moins de part à la persécution que Galère.

Dioclétien tomba malade cette année, et, se sentant affaibli, il fut le premier qui donna au monde l’exemple de l’abdication de l’empire. Il n’est pas aisé de savoir si cette abdication fut forcée ou non. Ce qui est certain, c’est qu’ayant recouvré la santé il vécut encore neuf ans, aussi honoré que paisible, dans sa retraite de Salone, au pays de sa naissance. Il disait qu’il n’avait commencé à vivre que du jour de sa retraite, et lorsqu’on le pressa de remonter sur le trône il répondit que le trône ne valait pas la tranquillité de sa vie, et qu’il prenait plus de plaisir à cultiver son jardin qu’il n’en avait eu à gouverner la terre. Que conclurez-vous de tous ces faits, sinon qu’avec de très-grands défauts il régna en grand empereur, et qu’il acheva sa vie en philosophe ?



DE DIODORE DE SICILE, ET D’HÉRODOTE[1].


Il est juste de commencer par Hérodote, comme le plus ancien.

Quand Henri Estienne intitula sa comique rapsodie Apologie d’Hérodote, on sait assez que son dessein n’était pas de justifier les contes de ce père de l’histoire ; il ne voulait que se moquer de nous, et faire voir que les turpitudes de son temps étaient pires

  1. Questions sur l’Encyclopédie, quatrième partie, 1771. (B.)