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DROIT CANONIQUE.

jours être libre et volontaire : il ne saurait y en avoir d’autre. La soumission, au contraire, à l’ordre civil peut être contrainte et forcée.

Par la même raison, les peines ecclésiastiques, toujours spirituelles, n’atteignent ici-bas que celui qui est intérieurement convaincu de sa faute. Les peines civiles, au contraire, accompagnées d’un mal physique, ont leurs effets physiques, soit que le coupable en reconnaisse la justice ou non.

De là il résulte manifestement que l’autorité du clergé n’est et ne peut être que spirituelle ; qu’il ne saurait avoir aucun pouvoir temporel ; qu’aucune force coactive ne convient à son ministère, qui en serait détruit.

Il suit encore de là que le souverain, attentif à ne souffrir aucun partage de son autorité, ne doit permettre aucune entreprise qui mette les membres de la société dans une dépendance extérieure et civile d’un corps ecclésiastique.

Tels sont les principes incontestables du véritable droit canonique, dont les règles et les décisions doivent en tout temps être jugées d’après ces vérités éternelles et immuables, fondées sur le droit naturel et l’ordre nécessaire de la société.


SECTION II[1].


Des possessions des ecclésiastiques.


Remontons toujours aux principes de la société, qui, dans l’ordre civil comme dans l’ordre religieux, sont les fondements de tous droits.

La société en général est propriétaire du territoire d’un pays, source de la richesse nationale. Une portion de ce revenu national est attribuée au souverain pour soutenir les dépenses de l’administration. Chaque particulier est possesseur de la partie du territoire et du revenu que les lois lui assurent, et aucune possession ni aucune jouissance ne peut en aucun temps être soustraite à l’autorité de la loi.

Dans l’état de société nous ne tenons aucun bien, aucune possession de la seule nature, puisque nous avons renoncé aux droits naturels pour nous soumettre à l’ordre civil, qui nous garantit et nous protège : c’est de la loi que nous tenons toutes nos possessions.

  1. Voyez la note de la page 429.