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ÉGLISE.


Constantin convoqua, assembla dans Nicée, vis-à-vis de Constantinople, le premier concile œcuménique, auquel présida Ozius. On y décida la grande question qui agitait l’Église, touchant la divinité de Jésus-Christ[1].

On sait assez comment l’Église, ayant combattu trois cents ans contre les rites de l’empire romain, combattit ensuite contre elle-même, et fut toujours militante et triomphante.

Dans la suite des temps, l’Église grecque presque tout entière, et toute l’Église d’Afrique, devinrent esclaves sous les Arabes, et ensuite sous les Turcs[2], qui élevèrent la religion mahométane sur les ruines de la chrétienne. L’Église romaine subsista, mais toujours souillée de sang par plus de six cents ans de discorde entre l’empire d’Occident et le sacerdoce. Ces querelles mêmes la rendirent très-puissante. Les évêques, les abbés en Allemagne, se firent tous princes, et les papes acquirent peu à peu la domination absolue dans Rome et dans un pays considérable. Ainsi Dieu éprouva son Église par les humiliations, par les troubles, par les crimes, et par la splendeur.

Cette Église latine perdit au xvie siècle la moitié de l’Allemagne, le Danemark, la Suède, l’Angleterre, l’Écosse, l’Irlande, la meilleure partie de la Suisse, la Hollande ; elle a gagné plus de terrain en Amérique par les conquêtes des Espagnols, qu’elle n’en a perdu en Europe ; mais avec plus de territoire elle a bien moins de sujets.

La Providence divine semblait destiner le Japon, Siam, l’Inde et la Chine, à se ranger sous l’obéissance du pape, pour le récompenser de l’Asie Mineure, de la Syrie, de la Grèce, de l’Égypte, de l’Afrique, de la Russie, et des autres États perdus dont nous avons parlé. Saint François Xavier, qui porta le saint Évangile aux Indes-Orientales et au Japon, quand les Portugais y allèrent chercher des marchandises, fit un très-grand nombre de miracles, tous attestés par les RR. PP. jésuites : quelques-uns disent qu’il ressuscita neuf morts ; mais le R. P. Ribadeneira, dans sa Fleur des saints[3] se borne à dire qu’il n’en ressuscita que

  1. Voyez les articles Arianisme ; Christianisme, section ii ; et Conciles. (Note de Voltaire.)
  2. Cette page et la page suivante faisaient le troisième double emploi avec l’article Christianisme (voyez ci-devant, page 175). (B.)
  3. Flos sanctorum, o Libro de las vidas de los santos, première partie, Madrid, 1590, in-folio ; seconde partie, Madrid, 1610, in-folio. L’ouvrage a été réimprimé, traduit en latin, en italien, en français. Il existe une autre Fleur des saints, par Alphonse de Villegas, Madrid, 1652 et suiv., 6 volumes in-folio.