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ÉPOPÉE.

retrouver l’auteur de ces vers admirables qu’on rencontre dans ses églogues :

Ut vidi, ut perii, ut me malus abstulit error !

(Virg., eglog. VIII, 41.)

Certainement le chant de la descente aux enfers ne serait pas déparé par ces vers de la quatrième églogue :

Ille deum vitam accipiet, divisque videbit
Permixtos heroas, et ipse videbitur illis ;
Pacatumque reget patriis virtutibus orbem.

Je crois revoir beaucoup de ces traits simples, élégants, attendrissants, dans les trois beaux chants de l’Énéide.

Tout le quatrième chant est rempli de vers touchants, qui font verser des larmes à ceux qui ont de l’oreille et du sentiment.

Dissimulare etiam sperasti, perfide, tantum
Posse nefas, tacitusque mea decedere terra ?
Nec te noster amor, nec te data dextera quondam,
Nec moritura tenet crudeli funere Dido ?

(V, 305-308.)

Conscendit furibunda rogos, ensemque recludit
Dardanium, non hos quæsitum munus in usus.

(V, 646-647.)

Il faudrait transcrire presque tout ce chant, si on voulait en faire remarquer les beautés.

Et dans le sombre tableau des enfers, que de vers encore respirent cette mollesse touchante et noble à la fois !

Ne, pueri, ne tanta animis assuescite bella.

(VI, 832.)

Tuque prior, tu, parce, genus qui ducis Olympo;
Projice tela manu, sanguis meus.

(VI, 834-835.)

Enfin on sait combien de larmes fit verser à l’empereur Auguste, à Livie[1], à tout le palais, ce seul demi-vers :

Tu Marcellus eris

(VI, 883.)
  1. M. Mongez a démontré la fausseté de cette anedocte dans un mémoire lu à l’Académie des inscriptions et belles-lettres, en 1818, qui n’est pas encore imprimé dans les volumes de l’Académie, mais qu’on peut voir dans l’Iconographie romaine, tome II, soit in-folio, soit in-4o. (B.)